1001 films de Schneider : Les enfants du paradis
Avec Arletty (Garance), Jean-Louis Barrault (Baptiste), Pierre Brasseur (Frédérick Lemaître), Pierre Renoir, Maria Casarès, Marcel Herrand
C'est dommage pour nous Québécois de la génération du baby-boom mais Les Enfants du paradis nous rappelle une période de l'histoire québécoise tristement célèbre qu'on a appelé "la grande noirceur" (pendant le règne du premier ministre québécois Maurice Duplessis de 1936 à 1939 puis de 1944 à 1959) pendant laquelle la religion catholique exerçât un pouvoir abusif sur la culture.
En effet, ce film fut interdit de projection au Québec lors de sa sortie en 1947. Cette année-là, Les enfants du paradis doit être projeté à l'Université de
Montréal dans le cadre d'un festival de films français. Le Bureau de la
censure l'interdit
jugeant le film pornographique parce que l'actrice Arletty y dégrafe
son corsage. Le délégué de la France interprète ce refus comme une
insulte à son pays.
On parle ici d'un grand poème de Prévert mis en images, d'un sommet du réalisme poétique. Une autre collaboration fructueuse du tandem Carné-Prévert (Quai des brumes, Le jour se lève, Les visiteurs du soir).
C'est Paris 1830, le boulevard du crime (la rue canaille de l'époque), un trio amoureux et un magistral hymne au théâtre à travers ses acteurs.
La réalisation de cette œuvre majeure s’est faite en pleine Occupation.
Des débuts du tournage, en 1943, aux studios de la Victorine à Nice (le
clin d’œil de Truffaut dans La Nuit américaine),
puis aux studios Francoeur à Paris, jusqu’à la sortie du film le 15 mars
1945, le tournage des Enfants du Paradis connaîtra de nombreuses
vicissitudes liées à la situation politique que traversait la France à
cette époque.
Arletty sera absente lors de la première du
film étant mise en accusation à cause de sa relation amoureuse avec un
officier allemand ce qui lui fit dire lors de son arrestation : "Si mon cœur est français, mon cul, lui, est
international ! »
Arletty, le degré zéro de l'interprétation. Mais on lui pardonne tout à cause de répliques comme : "On m'appelle Garance. Garance, c'est le nom d'une fleur" dites sur le ton le plus automate possible. Bresson a dû l'aimer cette Artletty, lui qui a toujours chercher chez ses comédiens amateurs une déclamation mécanique. Il devait leur dire : vous voulez faire comédien eh bien imitez Arletty.
On retrouve Jacques Prévert dans ces multiples jeux de mots faciles qui pimentent le scénario. En voici un célèbre : (Le commissaire à Garance) : "Comment vous appelez-vous?" " Moi, je ne m'appelle jamais, je suis toujours là. J'ai pas besoin de m'appeler. Mais les autres m'appellent Garance, si ça peut vous intéresser."
Baptiste le mime (Jean-Louis Barrault) et Garance (Arletty, à 47 ans quand même) |
Une séquence qui est à se tordre de rire : la représentation de la pièce L'Auberge des Adrets (dessins et texte complet sur Gallica) et la bouffonnerie qu'en fait Frédérick Lemaitre (Pierre Brasseur).
Venise 1946. Prix pour le film
Visionné, la première fois, le 2 décembre 1988 au cinéma à Paris
Mon 244ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 5 avril 2023